Mort de Robert Porchon, ami de Maurice Genevoix
Il y a cent ans, le 20 février 1915, mourait dans les combats des Eparges le jeune Robert Porchon, sous-lieutenant au 106e régiment d’infanterie. Enfant de Chevilly, il allait devenir sous la plume de Maurice Genevoix « le soldat le mieux connu de la Grande Guerre ».
Un courage calme et un ascendant moral
Dans le récit de ses 8 mois de guerre, Genevoix esquisse ça et là, par petites touches, le portrait de son condisciple du lycée Pothier, devenu frère d’armes au 106e régiment d’infanterie, ami et « frère de sang ».
Bord, ancien capitaine commandant la 7e Compagnie, à la mère de Robert Porchon, mars 1915 :
« Partout où le 106e a donné, Porchon y était et s’est signalé par sa fermeté, son courage calme. Lui qui n’était pas majeur, il avait conquis sur les hommes un ascendant moral à les conduire partout. »
Genevoix, dans sa première lettre à Madame Porchon, le 7 mars 1915 :
« Tout de suite s’établit entre nous cette solide fraternité d’armes qui naît des fatigues et des dangers partagés, des responsabilités communes, et aussi d’affinités profondes de nature.
A travers les dures épreuves, je mesurais mieux les qualités précieuses de votre fils. Je l’ai vu petit à petit, sans même qu’il fît effort pour cela, et comme par la seule puissance de sa bonté et de sa loyauté, s’attacher le cœur de tous ses hommes. Pour moi […] je l’aimais comme s’il eut été un frère de sang »
Robert Porchon à sa mère, le 16 décembre 1914 :
« Genevoix sous-lieutenant comme moi […]est très gai de caractère, et à nous deux, nous nous tenons compagnie dans ces journées interminables passées en chien de fusil au fonds des tranchées. Ce soir tout le monde est morose. Nous regrettons Mont où nous sommes si bien reçus. Il est vrai que nous connaissons déjà Rupt mais ça ne fait rien, on était bien ici ».
Lors de l’assaut des Eparges, il fut légèrement blessé au front. Alors qu’il descendait se faire panser, un éclat d’obus l’atteignit en pleine poitrine et il mourut sur le coup.
Dernières demeures
C’est dans ce village de Mont (village de Mont-sous-les-Côtes), tout près de la maison où ils avaient été « si bien reçus », qu’il fut enterré provisoirement en février 1915, et c’est là que Genevoix vint lui dire adieu. Puis le cimetière du Trottoir fut créé près des Eparges, dès 1915. Il y repose aujourd’hui ainsi que 2959 autres soldats ayant succombé dans les combats des Hauts de Meuse, et sa tombe y est aujourd'hui encore fréquemment fleurie.
Ecrits
Quelques semaines plus tard, le 7 avril, son frère Marcel décédait à son tour, laissant leur mère veuve et sans enfants. Madame Porchon recopia toutes les lettres et le carnet de route de Robert, rédigé du 25 août au 3 octobre 1914, ce qui en assura la pérennité. Ces écrits ont été édités en 2008.
L’acte de décès
Comme pour les autres morts au front, l’acte de décès de Porchon a été rédigé sur place par l’officier d’état civil de son régiment et transcrit sur le registre de sa commune de naissance le 8 octobre 1916, soit près de vingt mois plus tard. En 1916, sur les vingt-huit actes de décès enregistrés par l’officier d’état civil de Chevilly, onze sont des transcriptions d’actes de décès de soldats morts au front.
A lire
- Maurice GENEVOIX, Ceux de 14. Recueil de quatre volumes portant sur ses huit mois de guerre, dont Sous Verdun, dédié « A la mémoire de mon ami ROBERT PORCHON tué aux Eparges le 20 février 1915 », Hachette, 1916.
- Robert (sous-lieutenant) PORCHON, Carnet de route suivi de lettres de Maurice Genevoix et autres documents, éd. Thierry Joie, Paris, La Table Ronde, 2008, 207 p. (Arch. dép. du Loiret, BH P 4648).
Pour en savoir plus
- Le Site du CRID 14-18, dans son Dictionnaire et guide des témoins de la Grande Guerre, présente l’auteur, son témoignage, ainsi qu’une analyse des textes édités ici.
- A consulter aux Archives départementales :
- Acte de naissance en 1874 à Chevilly, première naissance de l’année (Arch. dép. du Loiret, 7E 93A/1, acte en ligne).
- Transcription d’acte de décès, registre d’état civil de Chevilly (Arch. dép. du Loiret, 7E 93A/4).
- Registre d’inscription des élèves du lycée Pothier (1907-1916).
Certains documents concernant Robert Porchon font défaut : sa fiche matricule est conservée aux Archives départementales des Yvelines, car il a intégré l’armée en tant que saint-cyrien à Versailles.
Date de modification : 10 février 2015