Maurice Genevoix
A l'occasion de sa panthéonisation, nous vous proposons un aperçu de la vie de Maurice Genevoix dans le Loiret
Maurice Genevoix (Décize 1890- Xabià 1980)
A l'occasion de sa panthéonisation, nous vous proposons un aperçu de la vie de Maurice Genevoix dans le Loiret
« Je souhaite que l'an prochain, ceux de 14, simples soldats, officiers, engagés, appelés, militaires de carrière, sans grade et généraux, mais aussi les femmes engagées auprès des combattants, car ceux de 14 ce fut aussi celles de 14, toute cette armée qui était un peuple, tout ce grand peuple qui devint une armée victorieuse, soit honoré au Panthéon », « Je souhaite qu'ils franchissent ce seuil sacré avec Maurice Genevoix, leur porte-étendard ». C'est en ces termes qu'a été annoncée la double panthéonisation, le 11 novembre 2020, de "Ceux de 14" et de Maurice Genevoix.
Les Archives départementales du Loiret ont souhaité s'associer à cet hommage
en présentant une vingtaine de documents relatifs à l'écrivain, sélectionnés dans leurs collections.
Les documents originaux seront présentés sur le site des archives historiques et généalogiques, 6 rue d'Illiers à Orléans, dès que les conditions sanitaires le permettront.
A Robert Rumilly, en souvenir de ses camarades de 131, et en témoignage de cordiale sympathie
Bien que né dans la Nièvre et décédé en Espagne, Maurice Genevoix est un véritable enfant de la Loire, ayant puisé une grande partie de son inspiration dans son enfance à Châteauneuf-sur-Loire, tandis qu’à l’âge adulte, bon nombre de ses ouvrages furent rédigés dans sa maison des Vernelles, choisie à Saint-Denis de l’Hôtel en bordure du fleuve.
Enfance en bord de Loire
A Châteauneuf-sur-Loire, ses parents tenaient une épicerie-mercerie, lieu stimulant pour son œil observateur qui s’intéresse à tout ce qui constitue le milieu rural d’avant-guerre. La nature qui entoure le jeune Maurice, et tout particulièrement la Loire, forme son terrain de jeux et d’aventures favori, univers dans lequel il trouve aussi consolation après le décès brutal de sa mère lorsqu’il a 12 ans.
A Orléans, il continue sa scolarité au lycée devenu aujourd’hui le lycée Pothier. Après sa mobilisation en août 1914, il combat aux côtés d’un camarade du même établissement, Robert Porchon, dont il deviendra l’ami et auquel il dédiera son premier ouvrage sur la guerre.
Guerre et blessure. Après sept mois de combats, grièvement blessé aux Eparges en avril 1915, Genevoix est éloigné définitivement à l’arrière.
(Arch. dép. du Loiret, 1 R 75347)
(Arch. dép. du Loiret, 1 R 75347)
Citation. - .
Cité à l’ordre du Corps
d’armée n°77 du 31 mai 1915. A
commandé la compagnie avec une
grande autorité sous différentes affaires.
A été blessé grièvement le 25 avril
alors que sous un feu très violent
il inspectait avec un calme parfait
la ligne de tirailleurs. Cité à
l’ordre de l’armée n° 3016
Officier d’un grand courage et
d’un remarquable sang-froid
a été atteint de 3 blessures
graves au cours de l’attaque
ennemie le 25 avril 1915 alors
qu’il parcourait la ligne de
feu pour encourager ses hommes
Paralysie de la main gauche.
(Arch. dép. du Loiret, 1 R 75347)
Décoration.- Chevalier de la
Légion d’honneur le 4.6.1916
(Arrêté M[inistéri]el du 28.6.16 – J.O.29.6.16
Croix de guerre, étoile de vermeil et palme.
Promu dans l’ordre de la Légion
d’Honneur à la dignité de Grand
Officier avec traitement pour compter
du 10.8.1948, Décret du 15.7.49
(J.O. du 19.7.49 p. 7012)
Blessures : Blessure par balle
le 25.4.1915 à la tranchée de Calonne.
Paralysie main gauche
(Arch. dép. du Loiret, Collection Maurice Genevoix, 530 J 3)
Châteauneuf-sur-Loire, 11 juillet 1916
J’ai eu un grand plaisir à recevoir votre lettre : le souvenir de mes journées d’hôpital, à Verdun, pour cuisant qu’il me puisse être, m’a laissé une curieuse impression de douceur paisible et de tiède sympathie. La joie d’avoir retrouvé les miens y était sans doute pour beaucoup ; mais la cordialité de l’accueil trouvé auprès de vous, lorsque, plus valide, je pouvais déambuler par le grand couloir vitré, y a bien été, aussi, pour quelque chose.
Ce que je suis devenu depuis notre dernière correspondance ? Vous vous rappelez qu’en quittant Verdun j’ai été évacué sur Vittel, puis Dijon. Je suis resté à Dijon jusqu’à la mi-juillet. De là, j’ai été envoyé à Bourges, centre neurologique, pour qu’on tente, sur mon bras gauche un essai de sutures nerveuses.
(Arch. dép. du Loiret, Collection Maurice Genevoix, 530 J 3)
Le Dr Dumay ne m’a opéré qu’au mois de septembre ayant attendu, pour le faire, la cicatrisation complète de mes plaies. Je suis resté encore deux mois à l’hôpital, pour massages, mobilisation, etc… Les résultats étant absolument nuls, le bras atrophié considérablement, la main en griffe, l’intervention chirurgicale, d’autre part, ayant révélé des lésions très graves, le Dr Claude m’a proposé pour la réforme n°1. La commission m’a placé en non-activité.
Je le suis encore, depuis novembre 1915. J’ai travaillé un peu ; je continue, écrivant en ce moment un 2e bouquin. Les promenades au bord de Loire m’ont tonifié : j’en avais, réellement, un très grand besoin.
Depuis quelque temps, des symptômes se manifestent dans le domaine du cubital (médium, annulaire et auriculaire). Porte ouverte à l’espoir. La guerre se prolongeant, je ferai sans doute une demande pour être appelé à un service sédentaire. Je me rappelle respectueusement au souvenir de Madame Labay et vous prie de croire à mes sentiments les plus cordiaux et les plus sympathiques.
Maurice Genevoix
Eloigné des zones de combat, Genevoix rédige et publie en pleine guerre un récit de son expérience au front.
« Sous Verdun », premier récit de sa présence au front, lui fut demandé avec insistance par Paul Dupuy, secrétaire général de l’Ecole Normale. L’expérience de la violence extrême des combats, celle de la mort de son ami Porchon et de la majorité des soldats de sa section, nourrissent la rédaction de cet ouvrage très précis et riche de détails concrets. Paru en 1916, le ton juste et sans fard n'est pas de mise en pleine guerre ce qui vaut au texte de subir de nombreuses censures. Si Genevoix en est violemment heurté, cela contribue à attirer l'attention du public averti sur l'authenticité du récit.
Ce premier tome sera suivi de quatre autres, rassemblés en 1949 sous le titre de « Ceux de 14 ».
L'auteur est servi par une mémoire exceptionnelle, particulièrement auditive. Il nous livre un récit détaillé de la vie au 106e R.I., un témoignage, entièrement habité par les individus qu’il a côtoyés. Il a su les voir, les entendre, s’en émouvoir, et sait remarquablement les évoquer par une simple anecdote, une citation, parfois presque phonétique. C’est en fait un morceau de la France de l’époque qu’il fait revivre, dans le contexte omniprésent de la guerre qui frappe chacun et l’amène à tenter de s’adapter selon sa personnalité et ses moyens.
(Arch. dép. du Loiret, fonds de l'Office national des Anciens combattants et victimes de guerre, 1382 W 245)
(Arch. dép. du Loiret, fonds de l'Office national des Anciens combattants et victimes de guerre, 1382 W 245)
(Arch. communales de Trainou, 14 O-SUPPL 4 H 7 )
Diplôme remis à la ville de Trainou pour sa participation au financement du Mémorial de la bataille de Verdun.
Les Vernelles, Saint-Denis-de-l'Hôtel, croquis et plan d'aménagements projetés, 1967.
(Arch. dép. du Loiret, Fonds André Bezançon, architecte, 25 J 104433)
En 1926-1927, Maurice Genevoix recherche une maison au bord de la Loire. Après quelques échecs, il la découvre « tout à fait par hasard », aux beaux jours, à Saint-Denis-de-l'Hôtel. Elle est magnifiquement située au bord de la Loire au hameau des Vernelles. Au chat "Rroû", son premier compagnon aux Vernelles et sujet d'un roman du même nom, il prête cette pensée :
Savez-vous ce qu'est une maison ? [...] Une maison, il n'en existe qu'une, et c'est la mienne. Nulle part ailleurs il ne peut y avoir, bien caché entre des murs épais, un tel amas de magnificence.
(Arch. dép. du Loiret, Fonds André Bezançon, architecte, 25 J 104433)
« Je n’ai pas eu à marcher longtemps. Juste la traversée d’un ruisselet sous un tunnel de prunelliers sauvages ; et simultanément, au débouché de ce couvert et après une brève grimpette, j’ai découvert ensemble trois lieues de fleuve et la maison. Une vieille maison, […] rêveuse, pleine de mémoire et souriant à ses secrets." Extrait de Trente mille jours.
(Arch. dép. du Loiret, Fonds André Bezançon, architecte, 25 J 104433)
(Arch. dép. du Loiret, Collection Maurice Genevoix, 530 J 3)
"Depuis quinze jours, nous vivons dans une maison qui retentit de coups de marteau, de raclement de parquet, de ronflements d’aspirateurs, quant à moi chassé de pièce en pièce par les frappeurs et les racleurs... J’en profite, - si je puis dire-, pour multiplier au dehors les démarches en quête de combustible, de casseroles ou de paille de fer. Il le faut bien, mais cela dure et durera encore un bon moment. Mais après, de quel cœur je vais me mettre à une autre besogne, -la mienne enfin, depuis longtemps souhaitée !"
(Arch. dép. du Loiret, Collection Maurice Genevoix, 530 J 3)
Maurice Genevoix écrivit un ouvrage sur le peintre fauviste, Maurice de Vlaminck, édité chez Flammarion en 1957.
L’Académicien
Si les Vernelles sont devenues son « port d’attache, son ancre de salut », la rencontre avec d’autres pays lui est tout aussi nécessaire et il ne cessera plus de voyager, principalement en Afrique, en Europe centrale et au Canada, à la découverte d’autres peuples, d’autres milieux naturels, d’autres « animaux libres ».
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Elu à l’Académie française en octobre 1946, il en devient Secrétaire Perpétuel en 1958. Fait rare, il démissionne de ses fonctions à 83 ans, dans le but d’écrire à nouveau et meurt presque la plume à la main, deux derniers ouvrages encore en cours de rédaction.
(Arch. dép. du Loiret, BR 1094)
(Arch. dép. du Loiret, 498 J 4)
Carte de visite de Secrétaire perpétuel de l'Académie française
(Arch. dép. du Loiret, Collection Maurice Genevoix, 530 J 2)
Les Vernelles
St-DENIS-DE-L’HOTEL T 96
LOIRET
Samedi, 15 Nov. 47.
Mon cher ami,
C’est de retour ici la nuit dernière que j’ai vu,
dans les Nouvelles littéraires, le reportage de Henri Dalby.
J’aurais aimé vous remercier tout de suite, à Paris
même, pour l’amitié confraternelle qui vous l’a fait
publier à cette date. Mais je ne le connaissais
pas encore quand nous sommes partis, tard hier au
soir, sans prévoir les crevaisons et les éclatements
successifs qui ont terriblement allongé notre voyage.
J’irai vous remercier bientôt, aux Nouvelles, et
vous serrer amicalement la main.
Maurice Genevoix.